Le gel de l’USAID «tuera des millions de personnes», alerte Caritas
Jean-Benoît Harel – Cité du Vatican
«L'arrêt brutal de l'USAID tuera des millions de personnes et condamnera des centaines de millions d'autres à vivre dans une pauvreté déshumanisante». Le secrétaire général de Caritas Internationalis, Alistair Dutton, ne mâche pas ses mots contre la décision de fermer les programmes et les bureaux financés par l'USAID dans le monde entier. Avec un budget de plus de 40 milliards de dollars, l’USAID finance l'aide humanitaire et celle au développement, dans quelques 120 pays, y compris les plus pauvres du monde.
«Une décision insensée»
Dans un communiqué diffusé lundi 10 février, Alistair Dutton assure que cette décision «condamnera des centaines de millions de personnes à vivre dans une pauvreté déshumanisante. Il s'agit d'un affront inhumain à la dignité humaine donnée par Dieu, qui causera d'immenses souffrances». «Le préjudice qui en résulte pour les personnes, en particulier les plus pauvres, sera catastrophique, menaçant la vie et la dignité de millions de personnes», poursuit le communiqué
Joint par téléphone, Alistair Dutton depuis le Burkina Faso, déplore les conséquences très concrètes de cette suspension de l’aide, créant une «incertitude complète pour le système humanitaire dans le monde». «Des bateaux arrivent dans les ports avec des cargaisons, mais nous ne pouvons pas payer ni le déchargement, ni le stockage et le transport vers les populations qui en ont besoin», explique-t-il.
Ainsi, en Afrique de l’Ouest par exemple, plus de 6 millions de personnes ne recevront pas leurs médicaments. De même, pour les 750 000 personnes en situation de famine au Soudan ou ceux réfugiés dans les camps en Syrie. «Quand on ne peut pas apporter d’eau, quand on ne s’occupe plus des toilettes de ces camps, des problèmes de santé critiques, qui vont tuer des millions de gens arrivent tout de suite», alerte Alistair Dutton. «Les gens qui ont besoin d’aide vont souffrir énormément, s’ils ne meurent pas tout simplement».
Une évaluation des programmes
La nouvelle administration américaine a décidé de réduire les effectifs et de tailler dans l’aide de Washington à l’étranger. Depuis samedi 8 février, tous les personnels de cette agence sont mis en congé administratif, et les fonds sont coupés pour 90 jours. Le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a annoncé que cette suspension précède une évaluation des programmes.
Caritas reconnait le droit de tout pays de revoir sa politique d’aide, mais alerte sur «la manière impitoyable et chaotique dont cette décision insensée est mise en œuvre». «Les États-Unis étant la plus grande économie du monde, leur aide est absolument énorme, même si en termes de pourcentage, ils sont en-dessous de plusieurs pays et notamment des pays européens», fait remarquer secrétaire général de Caritas. Les États-Unis fournissent environ 40% du budget total de l’aide humanitaire mondiale.
Caritas demande un effort de «compassion»
L’agence américaine est un «partenaire essentiel» depuis plus de 60 ans de l’Église catholique et Caritas. Face à ce trou financier mais aussi humain, le bras opérationnel de la charité de l’Église catholique implantée dans plus de 200 pays, Caritas, a pris des mesures. D’abord en demandant à l’administration de revenir sur cette décision et de «réaffirmer son engagement en faveur de la compassion et de la paix en soutenant les personnes les plus vulnérables dans le monde entier».
Ensuite, Caritas explique avoir renforcé ses efforts en termes de plaidoyer auprès des institutions nationales et internationales, pour endiguer les conséquences humanitaires de cette décision américaine. Elle assure aussi une collecte d’information pour connaître précisément l’impact sur les programmes humanitaires, et demande une meilleure coordination entre les différents partenaires.
Merci d'avoir lu cet article. Si vous souhaitez rester informé, inscrivez-vous à la lettre d’information en cliquant ici