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Messe en l'église Notre-Dame d'Afrique, à Goma, dans l'Est de la RDC, le 2 février 2025. Messe en l'église Notre-Dame d'Afrique, à Goma, dans l'Est de la RDC, le 2 février 2025.   (AFP or licensors)

Pour l’évêque de Goma, le dialogue est le seul chemin pour aboutir à la paix

La situation sécuritaire et humanitaire à Goma empire depuis l’entrée du groupe armé M23 dans la grande ville du Nord-Kivu. Les tueries, les enlèvements et les pillages devenus monnaie courante dans cette région de la République démocratique du Congo, «continuent de répandre psychose et angoisse dans les cœurs de la population», déplore l’ordinaire du lieu, Mgr Willy Ngumbi, qui ne cesse d’exhorter, avec confiance, les chrétiens de Goma à l’espérance.

Entretien réalisé par Christian Losambe, SJ – Cité du Vatican

Le conflit armé qui oppose les forces gouvernementales aux rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, se poursuit dans l’Est de la RDC, en particulier dans et aux alentours des villes de Goma et de Bukavu. Malgré plusieurs tentatives de dialogue avortées pour aboutir à des résolutions pacifiques entre les deux parties aux conflits, «la situation ne semble pas beaucoup changer», regrette l’évêque de Goma qui, toutefois, salue le courage et la détermination avec lesquels la population fait face à ce drame qui dure depuis plus de trois décennies.

Ce mardi devraient débuter, en effet, les pourparlers entre Kinshasa et le M23 depuis que le mouvement a repris les armes en 2021, s’emparant ainsi de vastes pans de territoires congolais. Cependant, «le groupe armé M23 a annoncé la veille qu'il ne participerait pas aux "discussions de paix" prévues mardi à Luanda, Kinshasa confirmant de son côté sa participation malgré ce désistement».

Dans un tel contexte semant désespoir, inquiétude et précarité des conditions de vie, Mgr Ngumbi exhorte les chrétiens de Goma à saisir le Carême comme un «temps de grâces qui invite à l’espérance, mais aussi à la conversion et au pardon». Il rejoint également l’appel à la paix et au désarmement lancé par le Pape François dans sa lettre adressée mardi 18 mars au directeur du quotidien italien “Corriere della Sera“, Luciano Fontana. Pour l’évêque de Goma, la guerre n’est pas la solution à ce conflit, «mais plutôt le dialogue car il est le seul chemin pour aboutir à la paix et à la sécurité en République Démocratique du Congo en général, et à Goma en particulier».


Excellence, comment pourriez-vous décrire la situation actuelle à Goma, ville conquise par le M23 depuis le 28 janvier 2025?

La situation n'a pas beaucoup changé. La seule différence est que la guerre n'est plus à Goma, mais s'est déplacée vers les autres zones du diocèse. Aujourd'hui, par exemple, l’une de nos paroisses à Walikale, située à 250 km de la ville, a été menacée par l'entrée de troupes du M23/AFC. De ce fait, ces jours-ci, les gens vivent de plus en plus dans la psychose.

Par ailleurs, les questions d’ordre sécuritaire demeurent avec des enlèvements, des tueries, et il devient impossible de dormir la nuit puisqu'il y a des bandits armés qui entrent dans les maisons pour rançonner les gens et piller.

Depuis le 5 mars, l'Église catholique a débuté son chemin vers Pâques avec le temps du Carême. Pourriez-vous nous décrire comment ce temps de grande préparation spirituelle est vécu par les fidèles et ce qu'ils représentent pour eux, principalement dans ce contexte que nous savons très difficile et de grande épreuve?

Le 5 mars, je suis allé célébrer l’Eucharistie des Cendres à la cathédrale et j'étais vraiment agréablement surpris de voir que l'église était remplie, car les chrétiens étaient venus nombreux pour commencer saintement le temps de Carême; et dans toutes les paroisses de la ville, l’ambiance était identique malgré la situation sécuritaire, mais aussi économique, qui demeure précaire. Comme vous le savez, depuis que la ville de Goma est tombée fin janvier, les banques ont fermé et il n'y a aucune institution financière qui fonctionne. La population, notamment les commerçants, sont privés de moyens de survie.

En outre, les fonctionnaires de l'État ne sont pas payés, les parents ont du mal à prendre en charge le frais de scolarité de leurs enfants. Et donc, la pauvreté s'est vraiment accrue dans le milieu. Toutefois, les chrétiens ont bien débuté le Carême, et pour nous, ce temps liturgique revêt un sens particulier, puisqu’il nous invite à l’espérance en un avenir meilleur, un avenir de paix.


Avec l'escalade des conflits et les affrontements qui ne cessent de faire rage, suscitant d'énormes inquiétudes des déplacements des populations, comment les chrétiens de Goma vivent-ils leur foi en ce moment?

En général, les gens vivent dans la peur et l’angoisse, puisque les nouvelles autorités ont utilisé des méthodes un peu trop drastiques pour rétablir la sécurité. Mais ce que j’apprécie chez les chrétiens, c'est qu'ils continuent toujours à être solidaires les uns avec les autres, surtout envers les plus pauvres, notamment les déplacés de guerre -dont la grande partie sont les familles de militaires. Ce sont des pratiques que nous mettons sur le compte des efforts de Carême en ce temps de grande crise.

Par ailleurs, les fidèles organisent des pèlerinages, sauf bien évidemment ici à Goma, et nous essayons d'organiser des Exercices spirituels au niveau des paroisses. Et nous constatons que les chrétiens continuent à persévérer dans la foi et à être solidaires les uns les autres.

Dans son message de Carême cette année, le Pape a repris le thème du Jubilé, «Pèlerins de l'espérance», pour inviter l'église toute entière à vivre un renouvellement intérieur. Comment l'Église locale accompagne-t-elle les chrétiens de Goma pour justement vivre ce temps dans une perspective d'espérance et de voir en cette Année Sainte une année de grâce?

Depuis le début du Carême avec le Centre diocésain pastoral, nous avons mis en place des groupes, des animateurs pastoraux qui vont dans les paroisses avec les curés, pour organiser des séances de campagne d'évangélisation puisque pour le moment, on en a vraiment besoin. Beaucoup de personnes y prennent part et nous abordons des thèmes qui ne sont pas toujours faciles, par exemple celui de l'amour de l'ennemi, du pardon ou du partage. Et ces campagnes ont beaucoup de succès.

C'est cette option que nous avons prise pour aider les gens à se renouveler, puisque le temps de Carême est celui de la conversion intérieure, à vivre ensemble comme des frères et sœurs malgré le contexte dans lequel nous nous retrouvons actuellement. Nous continuons également à prêcher l'amour fraternel et l'unité des chrétiens, l'ouverture envers les autres, même ceux qui ne sont pas de l'Église catholique.


Ce mardi 18 mars, les négociations devraient reprendre entre la RDC et le M23 à Luanda en Angola, elles avaient été suspendues à cause du retrait de ce dernier. Pensez-vous que ce processus de dialogue puisse aider à revenir à une situation plus paisible?

Pour nous, le Carême est également un temps d'espérance et de foi aux promesses du Seigneur, mais aussi à tout ce qui ravive l’espoir de ramener la paix et l'unité dans le pays, divisé aujourd’hui. Et ce dialogue est parmi les facteurs d'unité qui puissent aider à résoudre les problèmes que nous connaissons actuellement dans nos vies. C'est pourquoi nous avons été, et beaucoup de gens aussi, ont été déçus d'apprendre que le dialogue de Luanda ne peut plus avoir lieu ce mardi à cause du retrait du M23.

Toutefois, nous continuons toujours à espérer à la reprise des pourparlers car nous ne croyons pas tellement en une solution militaire à ce conflit car la guerre détruit des milliers de vies et creusera davantage le fossé de la pauvreté dans la région. Nous souhaitons aboutir plutôt à des résolutions pacifiques en optant pour le dialogue afin de retrouver le chemin de la paix et de l'unité du pays.


Souhaiteriez-vous ajouter un dernier mot?

Actuellement, la population de Goma souffre, et ce, depuis bien longtemps à cause surtout de la crise économique et de la crise humanitaire. Il y a beaucoup de gens, en effet, qui sont dans la rue, et même ceux qui sont rentrés chez eux, n’ont pas d’abri, puisqu'ils ont retrouvé leurs maisons détruites ou occupées. Cependant, nous gardons la foi et l'espérance. Nous demandons à tous nos frères et sœurs de nous soutenir par leurs prières, mais aussi par tous les moyens possibles, matériels et financiers. En outre, nous demanderons à tous ceux qui ont un quelconque pouvoir politique, de peser pour que le dialogue entre le gouvernement de Kinshasa et le mouvement du M23/AFC, puissent aboutir à la sécurité dans notre région et à l'unité de toute la RDC.

Suivre Mgr Willy Ngumbi, évêque de Goma en République Démocratique du Congo.
Mgr Willy Ngumbi, évêque de Goma, capitale du Nord-Kivu.
Mgr Willy Ngumbi, évêque de Goma, capitale du Nord-Kivu.

 

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