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Photo d'illustration. Un gardien dans la prison de Bourg-en-Bresse, en novembre 2018. Photo d'illustration. Un gardien dans la prison de Bourg-en-Bresse, en novembre 2018.  (AFP or licensors) Les dossiers de Radio Vatican

Transmettre l'espérance en prison, le témoignage d'un aumônier

Au lendemain de l’ouverture par le Pape d’une Porte Sainte en prison, un aumônier catholique, Bernard Biette, témoigne de son expérience dans une maison d’arrêt de l’Est de la France.

Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

Ce jeudi 26 décembre, en la solennité de la Saint-Etienne et au lendemain de Noël, le Pape a posé le premier geste significatif de ce jubilé 2025 placé sous le signe de l’espérance. François a ouvert une porte sainte dans une prison, celle de Rebibbia, à Rome.

L’espérance n’est pas nécessairement la première vertu qui vient à l’esprit en milieu carcéral et il arrive que la prison échoue à sa tâche de préparer les détenus à la réinsertion au sein de la société.

Certains détenus font appel à un aumônier. Leurs raisons sont multiples mais pour les aumôniers catholiques, c’est une occasion unique d’apporter un peu d’espérance et d’aider les condamnés ou les personnes en attente de jugement à poser un regard différent sur eux-mêmes.


Bernard Biette, vous êtes aumônier laïc, père de famille, et officiez à la maison d’arrêt de Sarreguemines, dans l’est de la France. Pouvez-vous nous parler de votre expérience et de la manière de transmettre l’espérance en prison?

Pour moi l'espérance, c'est venir au nom de Jésus, avec et à côté de Lui dans une cellule, afin de dire à nos frères en détention que Dieu est avec eux, que Dieu ne les a pas abandonnés malgré la faute qu'ils ont commises. Le rôle de l'aumônier consiste selon moi à leur apporter cette certitude qu'ils restent aimés de Dieu. Je pense que transmettre l'espérance, c'est leur donner cet espoir que Dieu les aime, autant que nous qui venons les voir.

Est-ce que le fait de parler d'espérance, c'est aussi une manière de les amener sur le chemin de la rédemption, aussi bien du point de vue spirituel que du point de vue, plus prosaïque, social?

Ce sont les deux choses à la fois. En prison, ils ne voient que des professionnels de justice. Nous, de manière bénévole, nous sommes là pour leur montrer que dehors, il y a aussi des gens qui pensent à eux et il y en a sans doute d'autres qui leur veulent encore du bien. Cela participe à l'idée de réinsertion dans la société, en leur montrant que dehors, tout le monde n'est pas contre eux.

Est-ce les détenus qui viennent vers vous et vous parlent d’espérance? Existe-t-il ce genre de sollicitations ou de préoccupations ou est-ce quelque chose que vous suscitez en eux?

Je pense qu'on l'initie. Par principe, on ne va voir évidemment que ceux qui sollicitent notre venue, et parmi ceux-là, je ne sais pas si la majorité d'entre eux formule vraiment d’eux-mêmes la notion d'espérance. Ils ont l'espérance en eux, mais je ne crois pas qu'ils formulent ce terme spontanément.

Qu'est-ce qui les pousse à vous solliciter?

Il y a de multiples raisons. Il y en a des basiques ‘’terre à terre’’: de voir quelqu'un, de discuter avec eux, ça c'est humain. Quand ils font appel à nous, ils savent pour quelles raisons on vient, au nom de qui. Donc il n'y a pas que le côté humain, je pense qu'ils ont besoin de se sentir écoutés. Et c'est en les écoutant qu'on voit un peu ce dont ils ont besoin, pourquoi ils nous ont fait venir. L'espérance fait partie de cette démarche que nous avons vis à vis d'eux et qu’eux ont vis à vis de nous. Ils souhaitent qu'on les aide dans leur démarche de détenu qui va de la révolte à l'acceptation, à la demande de pardon et à un une manière de vivre différente en sortant.

Vous percevez un changement chez le détenu du fait de vos visites?

Je pense qu'on participe à ce changement. Ceux qu'on voit quelques mois, voire quelques années, on voit qu'ils évoluent. Ils évoluent vis-à-vis de la faute qu'ils ont commise, vis-à-vis de la victime, ça c'est certain, et vis-à-vis d'eux-mêmes, parce qu'ils trouvent une certaine sérénité, je pense une certaine paix où il me semble qu’on est pour quelque chose. Notre présence les aide à évoluer lorsqu'ils sont en détention, où les conditions de vie sont très dures, mais elle les aide aussi, je pense, à franchir la porte de sortie, donc au final à leur réinsertion.

Vous parlez beaucoup de pardon avec les détenus?

Il est clair qu'on leur dit que Dieu pardonne. On leur dit que sa miséricorde est infinie mais qu’eux aussi doivent accepter ce pardon. C'est également important. Nous discutons beaucoup à ce sujet avec les détenus. Sans oublier évidemment la victime. Il arrive en tant qu'aumônier d’y prêter une attention peut-être insuffisante, mais on essaie aussi d'inclure cette dimension dans les paroles qu'on leur donne.

27 décembre 2024