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Clôture de l'assemblée plénière des évêques de Centrafrique Clôture de l'assemblée plénière des évêques de Centrafrique 

Centrafrique: consolider les acquis des missionnaires et des pères de la nation

De la mémoire de l’œuvre missionnaire dans leur pays, à celle des pères fondateurs de leur nation, les évêques centrafricains, réunis en 2ème session de leur assemblée plénière, rendent grâce à Dieu pour l’œuvre des pionniers de l’évangélisation de leur pays, avec une floraison des vocations et des témoignages de vie chrétienne qui s’observent jusqu’aujourd’hui. Les prélats soulignent cependant la nécessité de consolider l’inculturation du message évangélique et la dynamique d’auto-suffisance.

Fabrice Bagendekere, SJ – Cité du Vatican

 «Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce la paix, du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut […]»! C’est avec ce passage d’Isaï, 52, 7 que les évêques de la Centrafrique,  au sortir de la deuxième session de leur assemblée plénière, ont référé le message qu’ils ont adressé à l’Eglise de leur pays et tous les hommes et femmes de bonne volonté, rendant grâce au Seigneur pour les «œuvres de l’esprit» qui permettent de «voir au-delà du voile insurmontable des difficultés qui brouille la vision et empêche de regarder au-delà de l’horizon», trait fondamental de la mission prophétique, selon les prélats.  «C’est fort de cette grâce qu’il peut ‘‘annoncer la consolation, la joie, l’espérance, la vie, là où tous ne voient que lamentations et tristesses, désarrois et ossements desséché’’», ont-ils renchéri.

Hommages aux missionnaires de la Centrafrique

En faisant référence à cette «parole du messager de la paix…», les évêques centrafricains voulaient évoquer le jubilé de 130 ans de l’évangélisation de leur pays, célébrée tout au long de l’année 2024 qui venait de s’achever, rendant grâce au Seigneur, qui a fait d’eux «ses enfants et héritiers avec le Christ», référence faite ici à la lettre de Saint Paul aux Romains à son 8ème chapitre, verset 17. Occasion pour les prélats de rendre hommage à «tous les pionniers de la foi, aux infatigables missionnaires et hérauts de l’Évangile qui ont semé la bonne graine de la Parole de Dieu en terre centrafricaine», rappelant leur héroïsme et l’abondance de leur œuvre.

 «Ils ont initié la traduction de la Parole de Dieu en langue nationale et vernaculaire. Ils ont formé des catéchistes-animateurs des communautés ecclésiales, construit des Églises et promu des vocations masculines et féminines. Ils se sont aussi beaucoup investis dans le domaine socio-éducatif et sanitaire par la construction de centres scolaires et d’alphabétisation, de formations techniques et professionnelles ayant efficacement contribué à l’apprentissage des métiers (agriculture et élevage, mécanique, couture, briqueterie, maçonnerie, plomberie, menuiserie, etc.) et à l’insertion socioéconomique de beaucoup de personnes ainsi que des postes et centres de santé», écrivent les évêques.


Inquiétude face aux clivages et aux radicalisations politiques en Centrafrique

De la mémoire de l’œuvre missionnaire dans leur pays, les évêques centrafricains ont évoqué celle des pères fondateurs de leur nation, nommément, l’abbé Barthélemy Boganda, premier prêtre oubanguien et «Père Fondateur et socle de la nation centrafricaine». Son engagement politique, selon les évêques, s’est puisé en grande partie dans sa foi, dans l’enseignement de l’Évangile et de la Doctrine Sociale de l’Église qu’il avait reçu des missionnaires. Cet ancien ecclésiastique a «œuvré pour le rassemblement et l’unité nationale, pour la concorde et la paix», affirment-ils.

C’est ici que les évêques ont affiché leur préoccupation face au divisionnisme qui caractérise la politique actuelle de leur pays, invitant leurs politiques à suivre l’exemple de Boganda. «C’est avec beaucoup de préoccupations et d’inquiétudes que l’Église suit les clivages et les radicalisations des positions politiques. Elle invite les hommes politiques, qui se réclament tous du Président Boganda, à suivre son exemple en ne recherchant que les intérêts suprêmes de la nation centrafricaine», ont écrit les prélats, louant «son sang versé et celui de tant d’autres Centrafricains» qui, selon les pères évêques, restent pour leur pays «l’emblème symbolique du courage et du martyr de la Vérité, de la Justice, de l’Unité Nationale et de la Démocratie».

Bilan d’une floraison continuelle des vocations et témoignages chrétiens

Cette session a aussi été une occasion pour les évêques centrafricains de faire un bilan de la progression de l’Eglise sur leur terre, 130 ans après que les premières graines de l’Evangile y furent jetées. «Sous la conduite de l’Esprit-Saint, l’Église-Famille de Dieu en Centrafrique ne cesse de grandir en croissance et vitalité, constatent les prélats, en donnant pour signe «la floraison continuelle des vocations sacerdotales et la présence importante de nombre de [leurs] fils et filles qui se consacrent au Seigneur dans la vie religieuse et missionnaire», mais aussi et surtout les «catéchistes qui, un peu partout dans notre Église, disent les évêques, tiennent et animent les chapelles et les communautés chrétiennes, préparent leurs frères et sœurs aux sacrements, accompagnent les malades et aident ceux et celles qui sont en fin de vie à effectuer leur passage vers le Père».

Les prélats ont aussi évoqué les nombreuses associations des fidèles laïcs, aux mouvements, fraternités et groupes de prière, pour leur témoignage de «la diversité des dons et des charismes de l’Esprit-Saint» en face du monde. C’est ici que les évêques ont encore rappelé le rôle prophétique de l’Église. «Dans l’assomption de sa mission évangélisatrice et prophétique au service du développement humain intégral, de la justice, de la réconciliation et de la paix, notre Église ne pourra jamais se taire chaque fois que la vie et la dignité de l’autre, en particulier de celle des pauvres et des petits, des démunis et des laissés-pour-compte sont foulées au pied», ont déclaré les prélats, mentionnant ensuite, de façon spéciale, toutes les zones et populations de leur pays confrontées à l’insécurité. Les représentants de l’Eglise centrafricaine disent aussi être très fondement préoccupés par la situation de la jeunesse de leur pays, «abandonnée à elle-même» et perdu dans la consommation de la drogue, dans certaines localités, comme «exutoire de la résignation». Ils affirment, par ailleurs «s’engager résolument à l’émergence d’un Centrafrique renouvelé, d’une société plus juste et équitable».


Un chantier à reprendre sans cesse

L’Eglise s’est toujours voulu jeune et pour ce, ne cesse de se rajeunir, en prenant notamment compte les défis du moment. Conformément à cet esprit, les évêques centrafricains, «à la lumière de la célébration de la clôture du 130ème anniversaire de l’Évangélisation de [leur] pays»: «Centrafricain, Christ hier, aujourd’hui, demain, t’envoie !», n’ont pas manqué de se « pencher sur la mission aujourd’hui et prendre la mesure des défis et des chantiers qui s’imposent encore à [eux]». Ils ont souligné, notamment, la nécessité d’«approfondir la pratique de l’inculturation en repensant son approche pastorale et méthodologique» ; l’urgence de trouver «un meilleur accompagnement et une plus grande sollicitude vis-à vis de l’effervescence spirituelle qui anime les mouvements et les fraternités, les groupes de prière et les Communautés Ecclésiales de Base» ; et dans la même dynamique, faire de la formation des fidèles-laïcs  et des catéchistes «un chantier sans cesse à reprendre», sans oublier le dialogue avec les autres religions.

Les évêques insistent aussi sur la poursuite et la consolidation de «la dynamique de l’autoprise en charge», «avec un accent particulier sur le paradigme de la solidarité, du partage et de la péréquation entre les paroisses et les diocèses qui ont plus de ressources que d’autres», s’engageant à élaborer «une politique de gestion transparente des biens de l’Église et une culture de redevabilité pour asseoir la crédibilité de l’Église et honorer la confiance et la générosité des fidèles et autres bienfaiteurs». C’est aussi ici que les prélats en ont appelé à la disponibilité pour la mission aux communautés religieuses et diocèses, partout où le besoin se fait sentir et surtout à «écouter davantage l’appel des périphéries et à rejoindre nos frères et sœurs qui ne demandent qu’à écouter la Parole de Dieu et à recevoir les sacrements pour grandir dans leur vie de foi», insistant aussi sur la promotion et la valorisation des «différences et la diversité comme source d’enrichissement mutuel et surtout comme reflet de l’identité même de Dieu, … contre les stigmatisations et la rhétorique de l’ethnocentrisme exclusif… les germes de division et de tribalisme» au sein de la société.

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14 janvier 2025, 18:55