Décès du pére Ponchaud, grand témoin de l'histoire du Cambodge
Xavier Sartre – Cité du Vatican
C’est un enfant du Cambodge qui vient de disparaitre à l’âge de 85 ans, à Lauris, dans le sud de la France, dans la maison de retraite des MEP. Le père François Ponchaud, né le 8 novembre 1939 à Sallanches, en Haute-Savoie, est décédé ce vendredi 17 janvier, trois ans après avoir quitté définitivement l’Asie du Sud-Est où il avait exercé sa mission. C’est surtout un témoin direct de l’histoire bouleversante du Cambodge qui s’en va et que Radio Vatican a eu l’honneur d’interroger à plusieurs reprises pour analyser l’actualité du pays.
La relation entre le missionnaire savoyard, qui sert comme parachutiste en Algérie pendant vingt-huit mois pendant la guerre avant d’être ordonné prêtre en 1964, commence très tôt puisqu’il part pour Phnom Penh dès 1965. Il y apprend le khmer, et traduit même une bible œcuménique dans cette langue entre 1970 et 1975.
Témoin des horreurs des Khmers rouges
1975 est une année charnière dans sa vie et dans celle des Cambodgiens. Le père Ponchaud est aux premières loges pour assister à la prise du pouvoir par les Khmers rouges et à la chute de la capitale. Comme le rappelle Ad Extra, la plateforme des MEP qui a publié la nouvelle de sa disparition, le père Ponchaud est détenu dans l’ambassade de France pendant plusieurs semaines avant d’être expulsé du pays, le 8 mai 1975, moins d’un mois après l’arrivée des révolutionnaires.
Comme nombreux de prêtres, de religieux et de religieuses d’origine étrangère qui officiaient au Cambodge, il ne peut y rentrer qu’en 1993, quand la paix est restaurée après plus de quinze ans de régime khmer, de guerre civile et d’occupation vietnamienne. Pendant toutes ces années hors du pays, le père Ponchaud n’a de cesse de raconter le drame des Cambodgiens. En 1977, il publie ainsi Cambodge année zéro, un livre qui révèle au monde les horreurs commises par les maoïstes et qui devient un ouvrage de référence pour qui étudie ces événements et cette période. Il parcourt le monde et visite des réfugiés en France, en Europe, au Canada et aux États-Unis, sans compter les camps de réfugiés en Thaïlande, poursuivant son travail d’évangélisation.
Artisan infatigable de l'évangélisation
Après son retour au Cambodge en 1993, et pendant plus de vingt ans, il est en poste à Chamlak et O Réang Euv (Khet Kamong Cham). Comme l’affirme Ad Extra, «François Ponchaud a beaucoup contribué au développement de la société cambodgienne, dans les domaines de l’éducation et du développement social». Outre ses travaux de traduction, il écrit plusieurs livres en khmer, et lance plusieurs projets de développement rural. Il fonde également le Centre culturel catholique cambodgien pour enseigner la langue et la culture khmer aux missionnaires et volontaires, toujours dans l’optique, souligne les MEP, de «mieux servir le peuple cambodgien». Il œuvre également en faveur du dialogue interreligieux, principalement avec les bouddhistes.
Il passe les cinq dernières années de sa mission, jusqu'en 2021, dans une petite paroisse de campagne, entre activités spirituelles et culturelles, toujours attentif à ce qu’il se passe dans le pays. Pendant cette retraite, nous l’avons interrogé à deux reprises, pour les vingt ans de la mort de Pol Pot, le chef des Khmers rouges, en 2018, et pour les quarante ans de la chute du régime khmer, en 2019. À chaque fois, il a témoigné d’une grande lucidité sur la situation du Cambodge, et d’un profond amour pour ce pays.
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